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Le tombeau ultime

Bodrum

Retour du soleil ce matin, très agréable surprise (ce n’était pas du tout prévu) qui m’a permis de découvrir le « Saint-Tropez turc » (ce n’est pas moi qui le dit) sous un bien meilleur jour. Passants, chiens et chats ont quitté leurs abris, les terrasses du front de mer bruissent de conversations enjouées, les dés s’entrechoquent sur les tabliers de backgammon, et l’on s’active pour réparer les dégâts de la tempête (avant la suivante). Évidemment (et heureusement) l’ambiance reste bien plus calme et conviviale qu’au cœur de la saison, quand toute la jeunesse dorée d’Istanbul ou d’Ankara vient s’encanailler sous le soleil mordant de la mer Égée.

Sauf que Bodrum est loin d’être une banale station touristique. D’ailleurs le tourisme ne s’y est développé qu’à partir des années 60, principalement sous l’influence de l’écrivain Cevat Şakir, exilé ici en 1925, dans ce qui n’est alors qu’un simple village de pêcheurs : il tombe amoureux de la région, et va s’en faire l’ardent promoteur ! Surtout, Bodrum n’est que le nom moderne d’une ville grecque antique nommée Halicarnasse. Ah ? Oui, ça vous dit quelque chose ? Je l’ai vaguement évoqué il y a quelques jours : c’est ici que fût construite l’une des 7 merveilles du monde, le majestueux Mausolée.

Au IVème siècle avant JC, Halicarnasse est la capitale de la Carie, une vaste province semi-autonome de l’Empire perse, dirigée par le satrape Mausole. Comme tout bon tyran qui se respecte, il a des rêves de grandeurs, et commence vers la fin de sa vie la construction d’un gigantesque monument funéraire où il compte bien reposer pour l’éternité, le Mausolée. Eh oui, le nom de la tombe de Mausole est par la suite devenu un mot commun pour désigner tout tombeau de grande dimension, si ça c’est pas la classe ! Toujours est-il que le bâtiment est achevé en 350 avant Christ, soit trois ans après la mort de son propriétaire, sa sœur et veuve (à l’époque ce n’était pas déraisonnable…) s’étant chargée de finir le taf. 50 mètres de haut, une base massive surmontée de colonnes gigantesques, un toit à degrés pyramidal, plus bien sûr des kilomètres de frises et des statues par centaines, taillées par les plus grands artistes de l’époque. Ça devait valoir le coup d’œil…

Si Alexandre va raser Halicarnasse quelques années plus tard, le Mausolée va lui rester en assez bon état a priori jusqu’au XIIème siècle. Puis va tomber en ruines à la suite de plusieurs tremblements de terre. Du coup les gens vont commencer à se servir : oooh, un stock illimité de belles pierres taillées ! Ce seront les Hospitaliers qui achèveront l’édifice, en construisant un chouette château non loin de là, encore debout en l’occurrence. Et c’est un archéologue britannique qui va finalement retrouver la trace de l’ex-merveille en 1857, profitant de l’occasion pour piquer les quelques statues et mosaïques qui par miracle traînaient encore (visibles désormais au British Museum). Aujourd’hui il ne reste qu’un vaste trou dans le sol et des morceaux de colonnes éparpillés, derniers vestiges de ce qui fût la plus majestueuse tombe jamais construite.

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