Turku
À mon arrivée à Turku hier soir, après quelques minutes de discussion avec mon hôte, celui-ci m’annonce que sa ville est particulièrement laide. Ah… Étrange, c’est pourtant la ville la plus ancienne du pays, fondée par les Suédois au XIIIème siècle, et capitale jusqu’à l’arrivée des Russes au XIXème (ils transfèrent alors la capitale à Helsinki, beaucoup moins proche de l’ennemi). Du Moyen-Âge il ne reste malheureusement que deux choses : une cathédrale, successivement catholique puis luthérienne, et un château. Ça ne devrait pas être si horrible alors ? Mon logeur concède qu’effectivement ces deux monuments ne sont pas trop mal, mais à part ça… moche moche moche ! Que s’est-il donc passé ?
Déjà un incendie en 1827 ravage presque intégralement la ville. L’inconvénient de construire en bois… Puis pendant la Seconde Guerre Mondiale, l’URSS bombarde allègrement le coin. Enfin après-guerre, baby-boom et arrivée massive de ruraux en ville. Alors on rase les belles demeures en bois restantes pour construire à tour de bras de l’immeuble laid en béton, sans concertation aucune, et avec quelques petits « arrangements » politiques.
Reste que la question suivante se pose : le beau est-il absolu ? Mon hôte vit justement dans une superbe maison ayant miraculeusement échappé à la destruction. Mais est entouré de résidences modernes sans aucun cachet, une nouvelle se construisant d’ailleurs en ce moment même juste sous ses fenêtres. Son jugement peut-il être biaisé ? Et m’influence-t-il par la même occasion ? Je me dois d’en avoir le cœur net.
Alors effectivement, après arpentage en règle, on n’a sans doute pas affaire à la plus belle ville de la planète. Ni même une des dix premières. Ni même… Bon, je ne peux donc pas donner complètement tort à mon hôte. Pourtant cette promenade aura été plutôt plaisante, car je reste persuadé qu’en ouvrant bien les yeux, la beauté peut se cacher absolument n’importe où. Ici un petit parc sauvage offrant une vue sur les toits. Là quelques sculptures rigolotes. Un jeune goéland sur une vieille Peugeot. Un bac non loin d’un pont, mais autrement plus fréquenté (le plaisir d’un tour en bateau, aussi court soit-il). Un vélo repêché. Toutes les bornes électriques d’un quartier joliment décorées. Une suite de Fibonacci sur une cheminée d’usine. Un énorme passage piéton. Le reflet des immeubles sur le bitume après une grosse averse. Un rayon de soleil. Un sourire. Le beau est partout, pour qui veut le trouver.


C’est un des sujets récurrents du bac philo ….
Toutafé, je mettrai mon article à disposition des futurs bacheliers (même si bon j’avais eu 7…).