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Plata o plomo !

Jardín → Medellín – 4 h de bus puis métro

« Plata o plomo ! » (« De l’argent ou du plomb ! ») C’est avec ces quelques célèbres mots que Pablo Emilio Escobar Gaviria, alias El Patrón, menait la plupart de ses négociations. En d’autres termes : soit tu te laisses corrompre, soit je te tue. Inutile de dire que la plupart de ses interlocuteurs choisissaient l’option numéro 1.

Je suis arrivé à Medellín, la tristement célèbre ville colombienne où, entre les années 70 et 90, le plus connu des barons du crime fera régner la terreur. Mais pas pour tout le monde. Car si on estime que son cartel fera plusieurs dizaines de milliers de victimes, il s’agira principalement de concurrents ou de policiers (avec quelques dommages collatéraux, forcément…). Dans le même temps, il est adulé par une bonne partie de la population des quartiers pauvres, pour laquelle il construira terrains de sport, écoles, églises, hôpitaux, maisons… C’est toute l’ambiguïté de ce minot né dans la misère mais plein d’ambitions, qui pour les assouvir n’aura eu guère d’autres choix que d’embrasser le crime, dans une société élitiste et inégalitaire où la naissance conditionne bien souvent les opportunités.

Il tombe dans le trafic de drogue un peu par hasard, après avoir testé les escroqueries, la contrebande, le vol, le kidnapping… À 22 ans, il devient millionnaire en pesos colombiens. À 26 ans, il possède 3 millions de dollars américains sur son compte en banque. Il rencontre alors un gringo en discothèque, qui possède un avion et souhaite acheter de la cocaïne. Pablo se dit que ce business ne semble pas plus compliqué qu’un autre, et il se lance. En quelques années, il va réussir à monter un véritable empire de la poudre, expédiant aux États-Unis plusieurs tonnes de cocaïne par jour. En 1989, selon le magazine Forbes, il est le 7ème homme le plus riche du monde. On estime qu’il aurait accumulé au cours de sa « carrière » plus de 30 milliards de dollars. Pablo aime d’ailleurs préciser que son entreprise propose un retour sur investissement de près de 20 000 %. Imbattable…

Si au début son business passe relativement inaperçu, il finit par fortement attirer l’attention d’Oncle Sam. À partir du milieu des années 80, il devient l’ennemi public numéro 1. Débute alors une guerre sanglante avec l’état colombien (assisté par les États-Unis) qui fera des milliers de morts, allant même jusqu’à faire exploser un avion civil en vol pour tenter d’assassiner un candidat à la présidentielle (en vain). La guerre n’étant pas bonne pour les affaires, il négocie sa reddition en 1991 : il accepte de purger une courte peine de prison dans un centre pénitentiaire qu’il fait lui-même fait construire, avec piscine, bar et terrain de football… De là, il peut continuer de gérer son business en toute tranquillité !  

Mais un bandido ne fait généralement pas de vieux os : contraint de s’évader de sa propre prison par crainte de l’extradition (c’était globalement ce qui faisait le plus flipper tous les narcos colombiens : purger une peine aux États-Unis, dans des conditions nettement moins sympathiques !), en cavale pendant plusieurs mois, il est finalement retrouvé et tué par une coalition de ses nombreux ennemis le 2 décembre 1993, alors qu’il venait de fêter la veille ses 44 ans. À noter que sa fin violente reste à ce jour mystérieuse : accident au cours de la fusillade ? Exécution, par crainte qu’il échappe à nouveau à la justice ? Ou encore suicide, Pablo ayant toujours affirmé que le jour où il se ferait coincer pour de bon, il n’hésiterait pas un instant à se tirer une balle dans l’oreille, dans un ultime geste de défi.

30 ans plus tard, Medellín a pansé ses plaies, et est devenue l’une des métropoles les plus dynamiques du continent. Les touristes peuvent participer à un « Escobar tour », pour marcher dans les traces de l’un des plus grands criminels de l’histoire. Un peu malsain…

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