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Mets de l’huile

Melaka → Tanah Rata (Cameron Highlands) – 7 h de bus (via Kuala Lumpur)

Lorsque l’on traverse la Malaisie en bus, difficile de ne pas remarquer le vert qui domine massivement le paysage, à l’exception de quelques agglomérations. De la forêt primaire ? Oui, ce fut principalement le cas pendant des millénaires. Mais depuis désormais une quarantaine d’années, les plantations de palmiers à huile grignotent inlassablement la forêt jour après jour, et occupent désormais un cinquième du territoire malais. L’écologiste amateur que je suis aurait tendance à dire « paaas biiien ! ». Sauf que ce n’est pas aussi simple.

Évidemment en termes de perte de biodiversité, c’est une catastrophe, surtout quand on sait que la forêt tropicale humide qui prévaut ici est immensément riche d’espèces rares, souvent endémiques. Et la tendance n’est pas vraiment au ralentissement de la déforestation. Ça, c’est pour le côté « pas bien ».

Mais en même temps, ces plantations sont devenues vitales pour une partie croissante de la population rurale, à qui elles ont permis de sortir de l’extrême pauvreté. Car si initialement les exploitations étaient détenues uniquement par des grosses sociétés, de plus en plus de petits producteurs sont désormais impliqués (30% de la surface plantée en 2020), permettant une bien meilleure redistribution des profits. Par ailleurs, le palmier possède un rendement absolument prodigieux : environ 4 tonnes d’huile par hectare, contre 0,5 tonne pour le soja ou le colza. Le tout sans OGM ! Or s’il y a production, c’est qu’il y a demande. Et sans palmier, il faudrait donc cultiver 8 fois plus de terres pour parvenir au même résultat. Impensable.

Alors à moins que la population mondiale ne découvre miraculeusement la sobriété du jour au lendemain, la culture du palmier est devenue absolument incontournable. Et afin de limiter au maximum ses impacts sur la biodiversité, les associations de défense de l’environnement accompagnent désormais les producteurs afin de mettre en place des pratiques plus « durables », avec notamment la mise en place de corridors pour les orangs-outans.

À noter que les chercheurs malais font aussi remarquer, à juste titre, que nous autres Européens sommes plutôt doués pour s’ériger en donneurs de leçons ; mais que leur territoire est encore couvert à 70% par de la forêt (dont les 2/3 sont des forêts naturelles protégées), contre à peine 30% en France (et principalement pour de l’exploitation) ; et que le nombre d’orangs-outans à Bornéo est estimé à environ 60 000 individus, contre 70 ours sur l’ensemble des Pyrénées. Et toc !

4 Comments

  1. Perrot Isabelle

    Merci pour la mise au point. Alors est-ce que je continue mon boy-cot des produits avec huile de palme ?

  2. P'pa

    Bien sur qu’on est mal placé pour faire les malins en disant qu’il ne faut pas faire ça ou ça. Mais ça ne change rien au fond des chose. Ces milieux très artificialisés progressent à vitesse grand V au dépend des forêts tropicales. Même si on prend quelques précautions, même si le système économique de production est plus vertueux… Pas certain non plus que si c’est plus vertueux (et sans doute plus couteux) ce soit ces huiles là que l’on retrouve dans nos productions industrielles. Total aussi fait travailler beaucoup de monde, l’industrie de l’armement nourrit beaucoup de gens sur la planète… Bref, difficile de dire ce qu’il faut faire, mais on est bien trop nombreux sur notre planète et la base du problème elle est là, avec le fait qu’on a un peu oublié les liens du vivant qui tiennent tout ça ensemble. Bref, je ne suis pas optimiste, qu’on consomme ou pas de l’huile de palme.

    • Vadrouilleur

      Trop nombreux, trop nombreux, ça dépend. Si la planète comptait 8 milliards d’Indiens végétariens et piétons, ça ne poserait pas de problème. 8 milliards d’Américains amateurs de bœuf et de SUV, c’est une autre histoire…

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