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Les étudiants de Satsuma

Kagoshima (Kyushu) Naha (Okinawa) – 1 h 20 de vol

Avant de quitter Kyushu pour les tropiques, une dernière belle histoire (vraie). Comme nous avons pu le voir hier, la fin de l’ère Edo est marquée par une présence de plus en plus importante d’étrangers dans les parages, et notamment ici, au sud, dans la riche province de Satsuma (aujourd’hui Kagoshima) dirigée par le puissant clan Shimazu. En 1863, suite au meurtre d’un marchand anglais, la Royal Navy mène une joyeuse expédition punitive qui rase une bonne partie de la ville. La flotte est repoussée, mais les Japonais reclus se rendent compte de l’incroyable fossé technologique qui les sépare des nations occidentales.

Pour moderniser le pays et ainsi le protéger d’une éventuelle colonisation, il faut des connaissances ! Un accord est alors passé avec les Anglais (sans rancune) en 1865 pour envoyer 19 brillants samouraïs de Satsuma étudier à Londres. Le plus jeune n’a que 13 ans ! Bien sûr cela se fait en toute discrétion loin des oreilles d’Edo, car quitter le pays est strictement interdit à l’époque, et passible de mort. À bord du navire qui doit les conduire au loin, les jeunes gens se défont de leurs katanas et se coupent le chignon, les deux symboles du samouraï, renonçant ainsi à leur statut et leur culture.

Le voyage est éminemment épique, et les étudiants vont de découvertes en découvertes. Ils s’émerveillent devant les lampes à gaz de Hong-Kong, goûtent de la glace pour la première fois, sont choqués par des étrangers impudiques s’embrassant en public, sont grisés par la vitesse du train (on est encore loin du shinkansen…), et hallucinent devant le chantier titanesque du canal de Suez en construction.

Arrivés à Londres, ils s’attèlent avec diligence à leurs études, option « sciences modernes et industrie » (forcément moins d’intérêt à étudier le droit ou les lettres classiques…). Sauf Nagasawa, le benjamin, qui part seul au lycée en Écosse, dur dur… Tous parlent anglais en deux mois, et évidemment réussissent brillamment leurs examens, on n’avait pas envoyé les plus crétins. Ce ne sont pas les mêmes hommes qui quittent l’Angleterre un an plus tard.

De retour au Japon, l’ère Edo touche à sa fin, et les « étudiants de Satsuma » seront parmi les principaux artisans de la nouvelle ère qui s’ouvre : conseillers politiques influents, entrepreneurs à succès, et même créateurs du Tokyo National Museum. Quant à Nagasawa, il partit s’installer en Amérique, et se lança dans le business de la vigne sur la côte ouest, devenant le principal vigneron du pays et gagnant le surnom de « Roi du Vin de Californie ». Un choix de carrière plus original. Même si finalement, l’alcool et les étudiants font souvent bon ménage.

Morale de cette histoire : les études et les voyages, y a que ça de vrai !

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