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Propagande antique

Assouan → Abou Simbel – 4 h de bus

À l’extrême sud de l’Égypte, en plein cœur de la Nubie, trônent les célèbres et spectaculaires temples d’Abou Simbel. Le plus imposant est dédié au bien-connu Ramsès II, le Louis XIV local, pharaon tout-puissant à la longévité impressionnante : il meurt en -1213, à l’âge plus que raisonnable de 91 ans, après 66 longues années de règne. De quoi faire pâlir d’envie quelques dictateurs actuels… En tout cas un peu mégalo le bonhomme, puisque il est représenté dans son temple sous sa forme divine, en compagnie du panthéon classique de l’époque, Amon, Rê, Ptah et consort. Le second temple est dédié à son épouse favorite, Néfertari. Alors évidemment il est bien plus petit, et sur les six statues monumentales qui ornent l’entrée, quatre représentent Ramsès, et seulement deux Néfertari. Mais tout de même, dans une société déjà profondément patriarcale, le fait est assez rare et surprenant pour être mentionné.

Si ces temples ont bien sûr pour vocation de flatter les égos, ils sont là avant tout à des fins de propagande. Car ceux-ci ont été construits en plein cœur d’un territoire pas franchement fan de l’Égypte. Et ainsi tous les détracteurs pouvaient contempler la toute-puissance de l’empire, l’incroyable talent de ses artisans, et surtout le sort réservé à ceux qui osaient s’élever contre la volonté de pharaon, puisque les murs du grand temple sont constellés de scènes de guerre. Notamment le déroulé de la fameuse bataille de Qadesh (dans l’actuelle Syrie) qui opposa les Égyptiens aux Hittites, les deux grandes puissances belliqueuses de l’époque. Bataille remportée d’ailleurs uniquement grâce au génie militaire et à l’aveuglant charisme de pharaon, qui presque à lui seul mit l’ennemi en déroute, il est fort ce Ramsès. Petit bonus pour impressionner les foules : deux fois par an, le 21 février et le 21 octobre, le soleil se lève dans l’exact alignement du temple principal, illuminant les quatre statues qui se trouvent tout au fond du sanctuaire. La grande classe. Même si personne ne sait exactement pourquoi ces dates…

Bon sauf que désormais l’alignement solaire à lieu le 22, puisque le 21 concernait le temple initial datant d’environ -1260. Le temple actuel date, lui, de 1968. Euh, ah bon ? Eh bien oui, car tout comme le temple d’Isis visité la veille, ceux d’Abou Simbel allaient se retrouver sous plusieurs mètres d’eau à l’issue de la construction du haut-barrage d’Assouan et de la formation du lac Nasser. Ballot. L’UNESCO a donc pris les choses en main en lançant un petit financement participatif (300 millions de dollars), et c’est ainsi que des centaines d’archéologues et d’ouvriers se sont retrouvés à déplacer blocs par blocs les deux temples, reconstruisant le tout 65 mètres plus haut et à 200 mètres de la rive du fleuve. De la belle ouvrage. Tout le monde est content : l’humanité a gardé son patrimoine, l’Égypte une de ses sources de précieuses devises étrangères. Et au final la reconstruction n’enlève rien à la majesté du lieu. Ou pas trop, du moins, car la colline artificielle qui sert de coffrage aux temples fait un peu carton-pâte… Mais ne chipotons pas, on s’en prend plein les yeux, surtout en fin d’après-midi lorsque les lieux sont absolument déserts !

4 Comments

  1. P'pa

    Avec les photos on se croirait dans mon bouquin d’histoire de 6ème… mais les programmes ont peut être changés depuis.

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