Beaucoup (trop) de touristes au Paradis

Oslo → Flåm – 6h de train

Elles sont fortes quand même ces agences de voyage. Un petit malin s’est rendu compte qu’il était possible d’enchaîner train-train-bateau-bus-train d’Oslo à Bergen, en passant à travers les paysages sublimes du centre de la Norvège et avec une petite croisière au milieu. Un nom officiel qui va bien là-dessus : « Norway in a nutshell ». Et le tour est joué : vous avez juste à réserver quelques titres de transport, imprimer le tout, puis le revendre au double du prix à des millions de gogos touristes, que vous laissez ensuite plus ou moins se débrouiller.

Il se trouve néanmoins que cet enchaînement est bien pratique, surtout quand on a peu de temps, mais que l’on souhaite malgré tout faire un saut dans l’un des plus beaux fjords de Norvège (et du monde donc). Évidemment vous pouvez tout réserver par vous-même sans trop de difficultés. À plus forte raison à l’ère des applications mobiles. Me voici donc parti pour un « Homemade Norway in a nutshell ».

Alors vu que je copiais un parcours touristique, je me doutais bien que je ne serais pas seul sur le coup. Mais puisque dans le nord je n’avais finalement pas vu débarquer les hordes, j’espérais un peu qu’il en serait de même ici. Eh biiien, non. Il semblerait que la terre entière se soit donnée rendez-vous à Flåm, charmant petit village de quelques centaines d’âmes, tout au fond de l’Aurlandsfjord. Ça gâche un peu le plaisir. Car sinon, l’endroit est sublime.

L’aventure a donc commencé très tôt ce matin, dans un train. La ligne Oslo-Bergen est considérée comme un « must-do » des voyages ferroviaires. À raison. Si le début, au milieu de la forêt, rappelle beaucoup la Suède, on se rend néanmoins compte que l’on s’élève progressivement. Et soudain, en sortie de tunnel, le choc : on se retrouve à dominer une étroite vallée encaissée au fond de laquelle coule une large et paisible rivière. Et le train va remonter cette vallée jusqu’à ce que les flancs s’adoucissent en de hauts plateaux encore partiellement enneigés, à 1200 mètres d’altitude environ. Ici ce sont des dizaines de lacs qui parsèment le paysage. Quand le soleil est de la partie (et il l’était), on reste littéralement scotché des heures à sa fenêtre. Puis tandis que le train commence sa redescente, il faut s’arrêter à Myrdal, encore à plus de 800m. C’est d’ailleurs là que je me rends compte que pratiquement tous les passagers se sont arrêtés en même temps que moi, et ça fait du monde. Pourquoi à Myrdal ? Eh bien c’est ici le départ (ou l’arrivée) d’une toute petite ligne de 20 kilomètres, qui permet de rejoindre Flåm, altitude 0. Je vous laisse faire le calcul de la pente moyenne. Elle est conséquente. Et la vue bien sûr est à couper le souffle.

À peine une heure plus tard, voilà une belle cargaison de touristes fraîchement débarquée dans le petit village (sachant qu’une dizaine de trains arrivent chaque jour). La plupart continueront leur route le jour même, via une croisière sur le fjord. Les autres iront occuper les quelques hôtels hors de prix (vraiment) pour la nuit. Je suis dans la deuxième catégorie, quand même pas si pressé.

En prime cela me permet d’aller explorer un peu les environs. Une chouette balade, je suis loin d’y être seul. Ça grimpe sévère. Mon lot de consolation : des marcheurs replets pivoines, prêts à exploser. Oui la foule me rend un peu méchant. Même si bien sûr je dois accepter de partager la beauté du monde avec mes frères humains, c’est ainsi.